Archive for June 2012

Let’s remember November 29, 1987   Leave a comment

L’HORREUR DE LA RUELLE VAILLANT
(Haiti : 29 Novembre 1987)
Maryse Noël Roumain
(Article in French)
L’assassinat d’Yves Volel, avocat exilé rentré au pays après la chute de la dictature, candidat du Rassemblement des Démocrates Chrétiens Haïtiens, survenue dans la matinée du 13 Octobre 1987, aurait dû sonner pour moi l’alarme, mais cet assassinat, malgré la détérioration du climat ambiant, me sembla être un acte isolé. Yves Volel, opposant de longue date au régime duvaliériste, mourut revêtu de sa toge d’avocat, brandissant une copie de la Constitution devant l’immeuble des Recherches Criminelles, non loin de la statue du marron inconnu, symbole des esclaves qui avaient lutté pour la liberté. Il rencontrait à cet endroit la presse locale et étrangère à l’occasion de la détention illégale d’un de ses clients.
Je refusai d’admettre que son assassinat préfigurait le coup d’arrêt que voulaient porter à la marche vers la démocratie, les duvaliéristes, civils et militaires.
L’excitation était grande le jour des élections. Dans tous les coins et recoins de la capitale et de ses environs, dans tout le pays même, on se leva tôt pour aller se mettre en ligne d’attente devant les bureaux de vote. Mais au matin de ce 29 Novembre 1987, un groupe de 50 à 60 hommes, munis d’armes automatiques et de machettes, massacrèrent les électeurs qui s’étaient massés devant l’école nationale Argentine Bellegarde, à la ruelle Vaillant, à Port-au-Prince. Les victimes du massacre se chiffraient entre 34 et 200 selon les reportages. Dans l’Artibonite aussi on avait massacré des électeurs pour empêcher aux bulletins de vote d’atteindre le nord du pays.
Cette fois, l’enjeu était clair : il s’agissait d’intimider la population, d’arrêter les élections et le processus démocratique.
A la mi-journée, le Conseil National de Gouvernement décréta l’annulation des élections qui selon toutes les prévisions devaient être remportées par le juriste connu, membre du premier CNG, Gérard Gourgue qui briguait la présidence sous la bannière d’une large coalition de la gauche démocratique anti-duvaliériste incluant les communistes et les membres des ti legliz, partisans de la Théologie de la Libération.
Le soir, la télévision nationale projetait, comme par hasard, un film sur le massacre des communistes indonésiens par les militaires de leur pays dans les années soixante où des centaines de milliers de personnes furent tuées. Était-ce pour nous dire qu’en d’autres lieux, des militaires avaient commis des atrocités qui avaient fait plusieurs centaines de milliers de morts et que ce qui s’était passé en Haïti n’était « rien » en comparaison ? Était-ce pour nous dire que cela aurait pu être pire et que nous devions accepter ce qui s’était passé ? Était-ce pour nous dire que les électeurs de la ruelle Vaillant étaient des communistes ?
Cette fois, on ne pouvait plus s’illusionner : le projet démocratique était bel et bien dans l’impasse.

Posted June 19, 2012 by maryseroumain7 in Uncategorized